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Le Conseil des bourses de valeurs vient récemment d’élaborer une nouvelle réglementation intitulée « le retrait obligatoire »(1) complétant le dispositif normatif déjà en vigueur pour l’offre publique de retrait (2). Le retrait obligatoire donne la possibilité au groupe d’actionnaires majoritaires ayant proposé une O.P.R d’obtenir en quelque sorte une fermeture du capital de leur société. Une société ayant fait l’objet d’un retrait obligatoire ne sera plus considérée comme faisant appel public à l’épargne. Les justifications de cette nouvelle réglementation, sa dérogation au droit commun de la propriété des valeurs mobilières ainsi que ses modalités de mise en oeuvre sont autant de points qui nous sont apparus fort intéressant à étudier.

1/ LES RAISONS JUSTIFIANT LA MISE EN OEUVRE D’UNE PROCEDURE DE FERMETURE DU CAPITAL DES SOCIETES COTEES EN BOURSE: 

La fermeture du capital des sociétés cotées en bourse bien qu’elle soit un événemement assez peu médiatisé reste sans aucun doute un des grands problèmes contemporains de l’appel public à l’épargne. Les enjeux de ce renoncement à l’appel public à l’épargne des sociétés cotées sont multiples et concernent aussi bien la mission des autorités boursières que les intérêts des actionnaires minoritaires et du groupe majoritaire acquéreur. La radiation de la cote d’un émetteur de valeurs mobilières met régulièrement les autorités boursières face à un problème qui se pose en ces termes: Leur mission d’administration des marchés réglementés les amène à essayer de limiter le plus possible le nombre d’émetteurs inscrits à la cote qui ne respectent pas ou ne sont plus en situation de respecter leurs obligations inhérentes à l’appel public à l’épargne (3). Mais ce souci de protéger les épargnants est en réalité un dilemme. En effet, si la radiation de la cote d’une société empêche de nouveaux investisseurs peu avertis d’acheter les titres de sociétés ne respectant pas les règles de l’appel public à l’épargne, cette même radiation peu avoir de fâcheuses conséquences en ce qui concerne les investisseurs déjà actionnaires de ces sociétés. Une fois les titres radiés de la cote, ces petits investisseurs risquent en effet de rester « collés » comme l’exprime le jargon boursier, c’est à dire de ne plus pouvoir que très difficilement négocier leurs valeurs mobilières. Aussi, le Conseil des bourses de valeurs met généralement en oeuvre une solution de compromis consistant à radier du marché officiel ou du second marché les titres des sociétés ne satisfaisant plus à la réglementation pour les transférer sur le marché hors-cote. Cette solution impliquant cependant un inquiétant allongement de la liste des sociétés inscrites sur le marché hors-cote (4), le Conseil des bourses se devait de trouver des solutions. La première solution que le législateur et le Conseil des bourses de valeurs ont apporté à ce problème a été dès 1989 (5) la création de l’offre publique de retrait. L’O.P.R offre une solution aux actionnaires minoritaires dont les titres ont un marché qui manque de liquidité ou qui doivent subir une politique de la part du ou des actionnaires majoritaires qui leur est défavorable (6). Cette solution consiste pour les actionnaires minoritaires à se faire racheter leurs titres par les majoritaires. Il va sans dire que cette procédure d’offre publique de retrait ne peut être effectuée que si la situation boursière de la société dont les titres sont admis à la cote officielle ou au second marché répond à certaines conditions. La plus importante est que le ou les actionnaires majoritaires agissant de concert disposent de 95 % des droits de vote de la société pour pouvoir lancer leur offre. Il faut savoir enfin que la mise en oeuvre d’une O.P.R implique nécessairement la radiation de la cote de la société en cause et son transfert sur le marché hors-cote si certains petits actionnaires n’ont pas apporté leurs titres à l’offre. On remarquera donc que l’offre publique de retrait n’implique pas nécessairement la fermeture du capital d’une société au public. Ainsi, un nombre peu important de petits actionnaires peuvent empêcher une société de renoncer à l’appel public à l’épargne. A ce problème des minoritaires refusant d’apporter leurs titres à une O.P.R s’ajoutait le cas du petit actionnaire qui par inadvertance n’avait pas non plus apporté ses titres à l’offre ou, méconnaissant la réglementation boursière refusait d’apporter ses titres parce que le prix offert lui semblait trop bas. Ce refus était très vite suivi d’une déconvenue lorsque l’actionnaire découvrait que la société était transférée sur le hors-cote, marché où les valeurs sont assez difficilement négociables. Désormais, grâce au retrait obligatoire qui vient compléter le dispositif de l’O.P.R, les cas où des minoritaires estiment, parfois à tort, que la protection de l’épargne n’est pas bien assurée devraient peu à peu disparaître. Encore faudra-t-il que les dirigeants estiment que leur intérêt réside plutôt dans la mise en oeuvre ce retrait obligatoire. Un autre problème important que résoud cette procédure du retrait obligatoire est celui du renoncement volontaire à l’appel public à l’épargne des sociétés cotées. En effet, avant l’entrée en vigueur de cette procédure, certains dirigeants et actionnaires majoritaires d’une société se trouvaient en quelque sorte « prisonnier » de l’appel public à l’épargne. Cette quasi-impossibilité pour ces derniers de racheter la totalité des titres des actionnaires minoritaires les mettaient dans une situation de devoir respecter les contraintes qu’impose la cotation en bourse alors que leur volonté était de radier les titres de leur société des négociations. On imagine combien dans ces sociétés – dont la plupart finissent sur le hors cote – les obligations d’information du public pourtant allégées sont peu ou mal respectées. Le retrait obligatoire devrait pour cela clarifier le jeu et permettre aux dirigeants de prendre une position plus tranchée. Soit, la société reste cotée et ils devront se plier plus scrupuleusement aux règles de l’appel public à l’épargne, soit ils ne désirent plus que leur société soit cotée et ils pourront mettre en oeuvre des offres publiques qui s’achèveront par un retrait obligatoire. On remarquera que le retrait obligatoire n’est applicable qu’aux sociétés cotées ou ayant été cotées sur le marché officiel ou le second marché. Les sociétés qui ont été cotées sur ces marchés et transférées sur le hors-cote peuvent donc aussi bénéficier du retrait obligatoire. En revanche, les sociétés qui n’ont jamais été inscrites que sur le marché hors-cote ne peuvent subir une procédure de retrait obligatoire. Cette exclusion des sociétés qui n’ont connu que le marché hors-cote est due au régime d’admission trop libéral de ce marché. On imagine le détournement de procédure qui pourrait consister pour des actionnaires majoritaires à demander l’inscription au hors-cote de leur société aux seules fins de bénéficier d’une procédure leur permettant d’évincer certains minoritaires. Le texte sur le retrait obligatoire évite donc ce type de problème en reprenant le champ d’application des O.P.R.

2/ LA CONTESTABLE DEROGATION DE CETTE PROCEDURE AU DROIT COMMUN DE LA PROPRIETE DES VALEURS MOBILIERES: La procédure de retrait obligatoire est une procédure d’expropriation des actionnaires minoritaires représentant au plus 5% du capital d’une société. La privation autoritaire de la propriété de valeurs mobilières est apparue au Conseil des bourses de valeurs comme une nécessité pour fermer le capital d’une société. Certes, il était en réalité techniquement assez difficile de faire autrement pour clarifier le statut de l’appel public à l’épargne et il est vrai que nombre de sociétés ont une situation ambiguë sur ce point. Mais peut-être pourra-t-on s’intérroger sur la légitimité de ce nouveau chapitre du règlement du Conseil au regard de l’idée que l’on se fait de l’intérêt général en droit administratif classique. En effet, le retrait obligatoire est fort curieusement une procédure d’expropriation au bénéfice de personnes privées. Certes, il existe une idée d’intérêt général dans cette procédure puisque, comme nous l’avons évoqué, le retrait obligatoire devrait permettre d’épurer le marché de sociétés ne respectant pas vraiment les règles de l’appel public à l’épargne. Ceci étant, on remarquera que la réglementation n’impose pas aux actionnaires majoritaires d’une société de mettre en oeuvre une procédure de retrait obligatoire. Or, en quoi des minoritaires devraient-il plus que des actionnaires majoritaires à 95% supporter le fait qu’une société doivent fermer son capital parceque le marché de son titre ne satisfait plus aux règles de l’appel public à l’épargne? L’expropriation des minoritaires aurait dû, pour inspirer un peu plus de légitimité, offrir la possibilité au Conseil des bourses d’obliger, à la demande des minoritaires ou de son propre chef, les actionnaires majoritaires à acheter les titres permettant la fermeture du capital des sociétés. La réglementation en vigueur ne prévoit pas cela et laisse à la discrétion de l’actionnaire majoritaire l’initiative de mettre en oeuvre un retrait obligatoire. L’analyse de cette réglementation nous montre donc que la défense d’intérêts privés prévaut très largement sur la défense de l’intérêt général des investisseurs. L’utilisation de prérogatives de puissance publique pour satisfaire des intérêts privés (ne faisant pas l’objet de menaces) quand ils le désirent peut apparaître assez choquante. Cela d’autant plus qu’il existe en effet de petits actionnaires qui, pour des raisons les plus diverses ont et auront le désir de rester actionnaire d’une société, quand bien même celle-ci renonce à l’appel public à l’épargne. On peut penser aux salariés de l’entreprise, aux fondateurs, à certains partenaires industriels, aux concurrents et aux autres personnes voulant se faire entendre aux assemblées pour quelques motifs intéressant la société. Il est regrettable que cette voix des minoritaires désirant rester actionnaires d’une société quoiqu’il advienne n’ait pas été entendue. Le retrait obligatoire supprime l’opposition dans les assemblées des sociétés. Certes, il s’agit d’une opposition très minoritaire, mais ses idées ne doivent pas à priori être considérées comme moins bonne pour les intérêts de la société parce qu’elles viennent de la minorité. Le retrait obligatoire a pourtant été débattu puisqu’il a nécéssité l’intervention du législateur. En effet, il est constitutionnellement impossible au pouvoir réglementaire de prendre des mesures portant atteinte au droit de propriété. L’article 34 de la Constitution de 1958 prévoit en effet que la loi fixe les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales. Ainsi, le 31 décembre 1993, le législateur a modifié l’article 6 bis de la loi du 22 janvier 1988(7) afin que le Conseil des bourses puisse introduire dans son règlement général ces nouvelles dispositions concernant l’expropriation des actionnaires minoritaires. On regrettera que cette loi fourre-tout n’ait pas fait l’objet d’un débat parlementaire un peu plus vigilant et critique(8) .

3/ LES MODALITES DE MISE EN OEUVRE DE LA PROCEDURE DU RETRAIT OBLIGATOIRE: La procédure de retrait obligatoire peut aussi, comme nous l’avons déjà évoqué, nous apparaître comme une cession de rattrapage pour les petits actionnaires n’ayant pas apporté leurs titres à l’offre publique de retrait (9). Cette procédure permet du même coup au groupe majoritaire d’acheter la totalité des titres de leur société. Mais il faut bien noter que le retrait obligatoire – subordonné à la mise en oeuvre préalable d’une offre publique de retrait – reste pour l’actionnaire majoritaire une faculté. Le règlement général du Conseil prévoit d’ailleurs deux possibilités pour l’initiateur: soit il décide concomitamment à son offre publique de retrait de lancer dès sa clôture une procédure de retrait obligatoire, soit il attend le résultat de l’offre publique de retrait pour étudier s’il y a lieu d’engager une procédure de retrait obligatoire. Il a alors dix jours après la clôture de l’O.P.R pour se prononcer. La décision de l’actionnaire majoritaire dépend en réalité du résultat de l’O.P.R et de sa volonté plus ou moins affirmée de fermer le capital de sa société. On pourra cependant se demander si ces deux procédures distinctes (O.P.R et retrait obligatoire) ne répondent pas en réalité au même objectif. Dans la mesure où le seuil de détention de droits de vote à partir duquel il est possible de lancer une O.P.R est de 95%, quelle est au fonds la différence entre O.P.R et retrait obligatoire? Certes, dans l’offre publique de retrait, le consentement des 5% de minoritaires est requis pour pouvoir fermer le capital d’une société, alors que dans le retrait obligatoire, les actionnaires se voient privés de façon autoritaire de leurs titres. Mais, pour l’actionnaire majoritaire, l’intention de racheter les derniers 5% du capital de sa société répondent en réalité à une seule et même intention qui est de radier sa société de la cote et de fermer son capital. Le dédoublement de l’opération en deux parties semble en réalité plus correspondre au caractère incomplet de l’offre publique de retrait telle qu’elle a été initialement conçue qu’à une démarche de réelle rationalité juridique. Le Conseil des bourses de valeurs n’a pourtant pas voulu refondre entièrement le régime de l’offre publique de retrait et a adjoint à cette procédure le retrait obligatoire qui reste facultatif. Distinguer le retrait obligatoire pourrait cependant correspondre au caractère autoritaire de sa procédure. Il s’agirait là dans un premier temps de ménager les minoritaires et de limiter le contentieux en requérant leur consentement par voie d’O.P.R, puis de transférer dans un deuxième temps de façon autoritaire le reliquat de titres détenus par des petits porteurs. Mais cette distinction semble artificielle puisqu’une O.P.R ayant complètement échouée pourra quand même être suivie d’une procédure de retrait obligatoire pour évincer les actionnaires minoritaires inattentifs ou récalcitrants. Une autre interprétation envisageable peut-être élaborée à partir de la remarque que le seuil de 95% des droits de vote à détenir pour lancer une O.P.R ne résulte pas d’une disposition législative, mais du règlement général du Conseil des bourses de valeurs. L’intérêt de distinguer les deux procédures pourrait nous apparaître plus clairement si le Conseil des bourses de valeurs venait à abaisser le seuil à moins de 95% pour lancer une O.P.R. L’abaissement de ce seuil enlèverait l’impression de double emploi que donne ces deux procédures. En effet, dans ce cas, une O.P.R ayant échouée ne pourrait être suivie d’une procédure de retrait obligatoire (dont le seuil de 5% des titres expropriables bénéficie, lui, de la protection législative). On remarquera cependant, globalement, que l’abaissement de ce seuil de 95% impliquerait en réalité, vu les précédents, la possibilité pour les majoritaires d’évincer des sociétés cotées une frange encore plus large de minoritaires et que la plupart des O.P.R se finiraient sûrement en retrait obligatoire. En effet, la menace pour les minoritaires de voir leurs titres transférés au hors-cote où il sont difficilement négociables les amène généralement à apporter très largement leurs titres à l’ O.P.R. Cette dynamique fera qu’il restera sûrement assez souvent moins de 5% de titres sur le marché, ce qui permettra le retrait obligatoire. Les titres faisant l’objet d’une offre publique de retrait suivie d’un éventuel retrait obligatoire ne peuvent être évalués selon leur seul cours de bourse tant le marché du titre est étroit. Les actions des minoritaires sont évalués, c’est là une nouveauté, selon des critères déterminés par la loi et repris par le règlement général du Conseil des bourses. Le Conseil, investi d’une mission de protection des minoritaires en matière de retrait obligatoire ne doit autoriser cette procédure qu’à un prix qu’il juge convenable. Ses décisions en matière d’O.P.R ont pourtant été parfois contestées devant le juge(10) . En effet, la société en cause étant destinée à ne plus faire appel public à l’épargne, les titres des minoritaires ne seront plus évalués selon l’offre et la demande du marché. Les minoritaires n’ayant plus vraiment le choix pour négocier leurs titres ont assez facilement recours au juge pour tenter d’en obtenir un meilleur prix. Le Conseil des bourses de valeurs, pour remédier à ce problème d’évaluation, impose maintenant à l’initiateur de l’offre une appréciation multicritère de la valeur de la société pour déterminer quel sera le montant de l’indemnité versée aux minoritaires. L’évaluation de la société doit se faire selon les méthodes objectives pratiquées en cas de cession d’actif, tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas: – de la valeur des actifs;

– des bénéfices réalisés;

– de la valeur boursière;

– de l’existence de filiales;

– et des perspectives d’activité. On notera que ces critères ne sont pas exclusifs d’autres paramètres et qu’ils doivent comme le précise le règlement être relativisés en fonction de la spécificité de chaque société. Ce règlement tient compte en cela de la Jurisprudence « société biscuits poult (11) » où le juge dans le cas d’une O.P.R avait précisé que « si la sécurité du marché commande que le Conseil des bourses se prononce selon une méthode de valorisation de la société visée constante et connue des opérateurs, il ne saurait pourtant être tenu d’appliquer dans chaque cas des paramètres rigoureusement identiques; qu’il doit au contraire prendre en compte les facteurs de valorisation spécifiques à la société dans les circonstances contemporaines de l’offre en se référant à des critères et en appliquant des coefficients de pondération qui, à la date de sa décision, lui paraissent les plus appropriés ». Cette précision du juge nous semble tout à fait transposable en cas de retrait obligatoire. Le souci du Conseil des bourses de protéger les intérêts des minoritaires à été jusqu’à prévoir une possible réévaluation du prix dans le cas où l’initiateur se serait réservé la faculté de mettre en oeuvre le retrait obligatoire. Dans ce cas, l’initiateur qui a dix jours pour se prononcer après la clôture de l’offre doit proposer un prix au moins égal à celui de l’O.P.R ou supérieur s’il y a eu des évènements susceptibles d’intervenir sur la valeur de la société. Une autre nouveauté pour l’évaluation de la société réside également dans l’obligation faite à l’initiateur d’avoir recours à un expert indépendant pour déterminer le prix des titres à racheter. Cette intervention d’un cabinet indépendant nous apparaît comme tout à fait louable et pourra ainsi réduire les critiques faites au Conseil des bourses lorsqu’il donne son autorisation de lancer une offre à un prix donné ou finalement accepté par l’initiateur. L’expropriation des minoritaires, lorsque le Conseil des bourses de valeurs a donné son accord, se matérialise par une avis publié par la société des bourses françaises qui précise les modalités de mise en oeuvre et la date à partir de laquelle la décison devient exécutoire. Il faut savoir que le délai entre la décision et son exécution ne peut être inférieur à dix jours qui est le délai de recours juridictionnel applicable aux décisions du Conseil des bourses de valeurs (12). Enfin, et c’est là, souligons-le, le but du retrait obligatoire, on notera bien que la société ayant subi cette procédure est radiée de toutes les cotes, qu’elle ne peut être transférée sur le marché hors-cote et qu’elle ne fait donc plus appel public à l’épargne. Cette nouvelle procédure du retrait obligatoire montre une fois de plus le pragmatisme des autorités boursières désireuses de clarifier le statut de l’appel plublic à l’épargne. S’il est possible d’émettre quelques sérieuses réserves sur l’utilisation de prérogatives de puissance publique au profit de personnes privées, on peut néanmoins considérer que cette nouvelle procédure sert les marchés au sens où peuvent être radiés des négociations des sociétés qui, pour des raisons les plus diverses ne sont plus en situation de faire correctement appel public à l’épargne. Les potentiels investisseurs peu avertis sont ainsi protégés de la mauvaise volonté ou de l’indifférence des dirigeants. Quant aux actionnaires minoritaires, il leur est offert une ultime porte de sortie grâce à laquelle ils pourront céder leurs titres à un prix objectivement raisonnable. Pour que cette réglementation soit complète, il faut que la Commission des opérations de bourse produise un règlement concernant l’information que devront diffuser les initiateurs en cas de retrait obligatoire. Ce règlement ne devrait cependant pas modifier le principe de cette nouvelle procédure du retrait obligatoire.

Le 06 juin 1995

Christophe LEROY

Maître de Conférences

Université de Paris XII Saint-Maur.

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(1)Arrêté du 9 juin 1994 portant homologation de modifications du règlement général du Conseil des bourses de valeurs relatives aux offres publiques de retrait, J.O. du 18 juin 1994, p.8806.

(2)Sur les offres publiques de retrait, voir l’ouvrage d’Alain Viandier, « O.P.A, O.P.E, garantie de cours, retrait », Ed. Litec, 1993, p. 295. La thèse de Christophe Leroy, « L’encadrement juridique des marchés financiers par la puissance publique », Paris XII, 1993, p.513.

(3)Les éléments pris en considération par le Conseil pour motiver sa décision de radier de la cote officielle les titres de capital émis par une société française sont de deux sortes. Il s’agit d’éléments financiers et juridiques. Ainsi, par exemple, l’article 3-3-3 du règlement général du Conseil des bourses dispose que les éléments financiers pris en considération pour statuer sur la radiation d’une valeur sont (34): – La moyenne quotidienne des transactions exprimée en francs et en titres, ainsi que le nombre de jours de bourse où les titres ont fait l’objet d’une cotation, appréciés sur une année;

– La mise en paiement de dividendes sur les trois derniers exercices;

– Le pourcentage du capital diffusé dans le public. Les éléments juridiques sont:

– Le respect des engagements d’information pris lors de l’introduction sur le marché, ou lors d’opérations financières récentes.

– Le respect des dispositions du règlement du Conseil des bourses de valeurs. Ces cinq critères constitueraient de véritables couperets si l’on ne pouvait les relativiser et s’ils étaient appliqués à la lettre et de façon systématique. Il est rare en effet qu’une société au cours de sa carrière boursière ne soit pas en contravention avec un de ces cinq critères. Les bulletins mensuels de la Commission des opérations de bourse en témoignent. A titre d’exemple, en 1987, 487 sociétés n’avaient pas respecté leurs engagements relatifs à l’information périodique obligatoire, en ne publiant pas leurs comptes annuels provisoires à la date prévue et 550 sociétés n’avaient pas non plus publié leur chiffre d’affaires à la date limite prévue

(4)- Sur lequel se trouve aussi de jeunes sociétés respectant les règles de l’appel public à l’épargne.Le marché hors-cote est destiné à toutes les entreprises qui ne peuvent être admises à la cote officielle et au second marché parce qu’elles ne répondent pas aux conditions exigées. S’il apparait normal de demander aux sociétés de la cote officielle et du second marché d’avoir un capital assez important, une liquidité de marché convenable et des résultats solides, il serait peu fondé d’imposer de telles conditions à des petites entreprises en pleine croissance. Ainsi, l’existence d’un marché peu réglementé apparait comme nécessaire à l’acclimatation de jeunes sociétés à la vie boursière. L’existence du marché hors-cote est par conséquent pleinement justifiée. Il faut toutefois distinguer sur ce marché les sociétés désirant véritablement s’acclimater à la bourse et s’initier aux techniques boursières, des sociétés dont les titres sont cotées à la demande d’un ou plusieurs actionnaires afin qu’ils puissent vendre leurs titres.

(5)Loi n°89-531 du 2 août 1989 relative à la sécurité et la transparence du marché financier, J.O. du 4 août 1989.

(6)C’est à dire la transformation d’une société en société en commandite, lorsque les majoritaires se proposent de soumettre à l’approbation d’une assemblée générale extraordinaire une ou plusieurs modifications significatives des dispositions statutaires, notamment celles relatives à la forme de la société, aux conditions de cession et de transmission des titres de capital ainsi qu’aux droits qui y sont attachés. Lorsque les majoritaires décident le principe de la cession ou de l’apport à une autre société, de la totalité ou du principal des actifs, de la réorientation de l’activité sociale ou de la suppression, pendant plusieurs exercices, de toute rémunération des titres de capital.

(7)Loi n°93-1444 du 31 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la Banque de France, à l’assurance, au crédit, et aux marchés financiers. J.O. du 5 janvier 1994, p. 234. Cette loi modifie l’article 6 bis de la loi n°88-70 du 22 janvier 1988 sur les bourses de valeurs auquel est ajouté un cinquième alinéa ainsi rédigé: Les conditions dans lesquelles, à l’issue d’une procédure d’offre ou de demande de retrait, les titres non présentés par les actionnaires minoritaires, dès lors qu’ils ne représentent pas plus de 5% du capital ou des droits de vote, sont transférés aux actionnaires majoritaires à leur demande, et leurs détenteurs indemnisés. L’évaluation des titres doit se faire selon les méthodes objectives pratiquées en cas de cession d’actif, tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de la valeur boursière, de l’existence de filiales, et des perspectives d’activité. Cette indemnité est égale au montant le plus élevé entre le prix proposé lors de l’offre ou la demande de retrait et l’évaluation précitée. Elle est consignée en faveur des détenteurs de ces titres. Le quatrième alinéa de ce même article 6 bis nouvellement rédigé devient: Les conditions applicables aux procédures d’offres et de demande de retrait, lorsque le ou les actionnaires majoritaires d’une société inscrite à la cote officielle ou à la cote du second marché ou dont les titres sont négociés au hors-cote d’une bourse de valeurs après avoir été inscrits à la cote officielle ou à la cote du second marché détiennent de concert une fraction déterminé des droits de vote ou lorsqu’une société inscrite à l’une de ces cotes est transformée en société en commandite par actions.

(8)Voir les débats parlementaires de l’assemblée nationale et du sénat du 15 au 18 décembre 1993 publiés au J.O. Pour le sénat, séance du 18 novembre 1993, J.O., p.4440, Pour L’A.N., J.O.du 15 décembre 1993, p.7673. Voir aussi les rapports du sénat n°88 et 214 (1993-1994) et les rapports de l’ assemblée nationale n°769 et 909.

(9)Ce qui n’est pas le cas pour les O.P.R. Par exemple, dans l’affaire Canson, le Conseil des bourses de valeurs a refusé de donner une suite à une demande présentée par un minoritaire. Or, cette demande répondait aux critères prévus par l’article 5-5-2 (La société était contrôlée à 95% ou plus par les majoritaires) du règlement général. Le seul problème était que le titre avait fait l’objet un peu avant d’une offre d’échange lancée par la société Arjomari-Prioux, laquelle société avait prévenu les actionnaires de Canson qu’elle demanderait la radiation du titre de la cote si l’offre publique était menée à bien comme ce fut d’ailleurs le cas. Le Conseil des bourses de valeurs a dans cette espèce motivé son refus en expliquant qu’une offre publique de retrait ne pouvait être considérée comme une session de rattrapage pour les minoritaires qui, parfaitement informés des conséquences de cette opération d’offre publique portant sur leur capital, n’avaient pas apporté leurs titres à cette O.P.E.

(10)Cour d’appel de Paris, 7 novembre 1990,arrêt Champy, drouot assurances, la paternelle.

Cour d’appel de Paris, 18 avril 1991; arrêt Pabim, Candy, usines de rosières.

Cour d’appel de Paris, 8 juillet 1992, arrêt société biscuit poult.

(11)Cour d’appel de Paris, 8 juillet 1992,arrêt société biscuit poult, précitée.

(12)Voir l’article 3 alinéa 2 du décret n°88-603 du 7 mai 1988 relatif aux recours exercés devant la Cour d’appel de Paris contre les décisions du Conseil du marché à terme et du Conseil des bourses de Valeurs.

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ANNEXES TEXTES TITRE 5 CHAPITRE 6 DU REGLEMENT GENERAL DU CONSEIL DES BOURSES DE VALEURS 

Article 5-6-1 A l’issue d’une offre publique de retrait réalisée en application de l’article 5-2-2 ou 5-5-3, l’actionnaire ou le groupe majoritaire peut se voir transférer les titres non présentés par les actionnaires minoritaires moyennant indemnisation de ces derniers. Lors du dépôt du projet d’offre, l’initiateur fait connaître au conseil s’il se réserve la faculté de demander la mise en oeuvre du retrait obligatoire une fois l’offre terminée et en fonction de son résultat, ou s’il demande que le retrait obligatoire soit réalisé dès la clôture de l’offre publique de retrait. A l’appui du projet d’offre, l’initiateur fournit au Conseil une évaluation des titres de la société visée, effectuées selon les méthodes objectives pratiquées en cas de cession d’actif, tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de la valeur boursière, de l’existence de filiales et des perspectives d’activité. Cette évaluation est assortie de l’appréciation d’un expert indépendant. Le Conseil examine le projet d’offre dans les conditions prévues à l’article 5-2-7. S’il le déclare recevable, les conclusions qu’il a retenues pour former sa décision sont précisées dans l’avis publié par la société des bourses françaises.

Article 5-6-2 Si lors du dépôt du projet d’offre, l’initiateur s’est réservé la faculté de procéder après l’offre au retrait obligatoire, il indique au Conseil, dans un délai maximal de dix jours de bourse après la clôture de l’offre, s’il renonce ou non à cette faculté. Sa décision est annoncée dans l’avis de résultat de l’offre publié par la société des bourses françaises. Si l’initiateur décide de procéder au retrait obligatoire, il décide de faire connaître au Conseil le prix proposé pour l’indemnisation. Ce prix est au moins égal au prix de l’offre publique de retrait. Il lui est supérieur si des évènements susceptibles d’influer sur la valeur des titres concernés sont intervenus depuis la recevabilité de l’offre publique de retrait. La décision du conseil sur le retrait obligatoire est rendue publique par un avis de la société des bourses françaises, qui précise ses conditions de mise en oeuvre et notamment la date à laquelle elle devient exécutoire, le délai entre la décision et son exécution ne pouvant être inférieur au délai visé dans le deuxième alinéa de l’article 3 du décret du 7 mai 1988. Cette décision entraîne la radiation de la cote officielle ou de la cote du second marché des titres visés, et le retrait du relevé quotidien du hors-cote des titres qui y figuraient. Les dépositaires teneurs de compte procèdent aux opérations de transfert des titres non présentés à l’offre publique de retrait au nom de l’actionnaire ou du groupe majoritaire qui verse le montant correspondant à l’indemnisation de ces titres dans un compte bloqué ouvert à cet effet, dans des conditions fixées par une décision générale.

Article 5-6-3 Si, lors du dépôt du projet d’offre, l’initiateur a demandé au Conseil de procéder au retrait obligatoire dès la clôture de l’offre et quel qu’en soit le résultat, l’avis d’ouverture de l’offre précise les conditions de mise en oeuvre du retrait obligatoire, et notamment la date de sa prise d’effet. Dès la clôture de l’offre publique de retrait, les titres concernés sont radiés de la cote officielle ou de la cote du second marché ou retirés du relevé quotidien du hors cote. A la même date, Les dépositaires teneurs de compte procèdent aux opérations de transfert des titres non présentés à l’offre publique de retrait au nom de l’actionnaire ou du groupe majoritaire qui verse le montant correspondant à l’indemnisation de ces titres dans un compte bloqué ouvert à cet effet, dans des conditions fixées par une décision générale du Conseil.